Modéré par Biram Ndeck Ndiaye, expert en protection sociale, le panel a rassemblé des figures éminentes : Abdou Cissé (Directeur général de Cisco Consulting, président des actuaires de la FANAF), Ibnou Sougoufara (Dangote), Bakary Diabaté (Directeur des Études de l'IPRES), et Abou Aw (Directeur des pensions du Fonds National des Retraites).
La protection sociale : Un droit fondamental et un devoir de l'État
Biram Ndeck Ndiaye a rappelé, en introduisant le débat, que la protection sociale est une composante essentielle des assurances de personnes, englobant la santé, la retraite, la maternité et les accidents. Il a insisté sur l'impératif d'une protection sociale universelle, tout en reconnaissant les défis de financement et d'extension aux travailleurs évoluant dans le secteur informel et dans l’agriculture. M. Ndiaye a indiqué que la solidarité nationale et la responsabilité de l'État sont des piliers essentiels pour arriver à une protection efficace.
Abdou Cissé a insisté sur la responsabilité de l'État en matière de protection sociale, la qualifiant de devoir plutôt que de simple concession. Il a critiqué les limites historiques du système africain, principalement conçu pour les salariés, et son incapacité à intégrer un secteur informel grandissant, exacerbé par les ajustements structurels et la dévaluation du franc CFA. M. Cissé a appelé à un engagement fort de l'État pour résorber ce "passif social".
Des systèmes existants aux ambitions d'inclusion
Bakary Diabaté de l'IPRES a détaillé l'architecture de la protection sociale au Sénégal, qui repose sur un volet contributif (IPRES, CSS) et un volet non contributif (filets sociaux, bourses familiales, CMU, etc.). Il a précisé que le Sénégal a adopté l'approche basée sur les droits en 2015. Selon M. Diabaté, l'ambition du gouvernement d'élargir la couverture au secteur informel s'est traduite par des initiatives telles que le Régime simplifié pour les petits contributeurs (RSPC). Une phase pilote pour les artisans est en cours, avec une extension progressive prévue pour les groupes organisés.
Abordant la question des faibles taux de pensions, M. Diabaté a mis en lumière le rôle crucial et complémentaire des assureurs. Il a expliqué que le régime de répartition de l'IPRES, avec une cotisation plafonnée, aboutit à des pensions modestes pour les hauts salaires. Il a souligné l'importance pour les travailleurs de souscrire à une assurance complémentaire pour garantir leur sécurité financière après la retraite. "Si vous avez 1 million [de salaire], l'IPRES prend seulement 432 000 francs qui est l'assiette de cotisation maximale, ce qui vous donne droit à une pension en moyenne de 84 000 F par mois," a-t-il illustré, insistant sur le fait qu'un salarié récupère l'intégralité de ses cotisations à l'IPRES en seulement cinq ans de perception de pension.
Réformes et revalorisation des pensions des fonctionnaires
Abou Aw, Directeur des pensions du Fonds National des Retraites (FNR), a présenté le système de retraite des fonctionnaires, structuré par un cadre juridique, institutionnel et financier rigoureux. Il a mentionné les instructions des plus hautes autorités en faveur de la revalorisation des pensions, citant la signature récente du pacte national de stabilité sociale.
M. Aw a également détaillé les causes de la dégradation du taux de remplacement des pensions, en particulier pour les hauts cadres, qui font face à de réels problèmes de pouvoir d'achat à leur retraite. Selon lui, des réformes sont en cours pour améliorer l'assiette de cotisation et développer un régime complémentaire par capitalisation. Il a, toutefois, prévenu que cela pourrait impacter les salaires et nécessiterait une communication approfondie avec les usagers et le patronat.
Consensus et pistes pour l'avenir
En synthèse, Biram Ndeck Ndiaye a souligné que la sécurité financière englobe également la santé, la maternité, l'invalidité et les accidents du travail. Il a réaffirmé la nécessité d'une assurance universelle et inclusive, protégeant les populations vulnérables et répondant aux nouvelles demandes de couverture. Les échanges avec les participants ont été vifs. Ibnou Sougoufara de Dangote a insisté sur l'urgence d'une protection sociale inclusive face à l'urbanisation rapide et à l'augmentation de l'espérance de vie. Il a plaidé pour une réforme du système, donnant plus de pouvoir aux assureurs et aux institutions financières, l'État se concentrant sur la sécurisation des fonds de pension. Il a même suggéré la mise en place d'un fonds de garantie couvrant l'éducation, soulignant l'insoutenabilité du système qui prévaut dans les universités publiques du Sénégal.
Lors des débats plusieurs points clés ont fait l’objet de consensus. La protection sociale, la maladie, et surtout la retraite, sont une nécessité impérieuse. La complémentarité entre les systèmes publics (IPRES, FNR) et les assureurs privés est désormais largement acceptée. La réflexion doit se concentrer sur les réformes paramétriques et institutionnelles pour améliorer le niveau des pensions. Il est crucial de plaider auprès des autorités publiques pour l'instauration d'un régime de retraite complémentaire obligatoire pour tous les travailleurs.
Des pistes de collaboration entre la Caisse des dépôts et consignation (CDC) et les acteurs de la protection sociale ont été esquissées, notamment la création d'un fonds fiduciaire et l'investissement dans des secteurs rentables comme l'énergie. La retraite complémentaire volontaire a été identifiée comme une démarche individuelle et collective, nécessitant une collaboration avec les syndicats de la fonction publique.
Les assureurs au cœur de la refonte
Le panel a souligné le rôle central que les assureurs doivent jouer dans tout projet de protection sociale étatique. L'extension de la couverture aux produits et aux personnes est une nécessité absolue, tout comme la revalorisation des pensions par la complémentarité des organismes. L'établissement d'un cadre de collaboration, le benchmarking des exemples réussis, l'adaptation de la réglementation et la promotion de produits innovants, tels que la rente d'éducation, sont autant de leviers pour bâtir une protection sociale solide et sécurisante. L'idée de rendre la retraite complémentaire obligatoire, en confiant aux assureurs le déploiement de l'assurance-vie, est désormais sur la table pour garantir une décence financière aux travailleurs après leur retraite.
Lejecos Magazine Août 2025
La protection sociale : Un droit fondamental et un devoir de l'État
Biram Ndeck Ndiaye a rappelé, en introduisant le débat, que la protection sociale est une composante essentielle des assurances de personnes, englobant la santé, la retraite, la maternité et les accidents. Il a insisté sur l'impératif d'une protection sociale universelle, tout en reconnaissant les défis de financement et d'extension aux travailleurs évoluant dans le secteur informel et dans l’agriculture. M. Ndiaye a indiqué que la solidarité nationale et la responsabilité de l'État sont des piliers essentiels pour arriver à une protection efficace.
Abdou Cissé a insisté sur la responsabilité de l'État en matière de protection sociale, la qualifiant de devoir plutôt que de simple concession. Il a critiqué les limites historiques du système africain, principalement conçu pour les salariés, et son incapacité à intégrer un secteur informel grandissant, exacerbé par les ajustements structurels et la dévaluation du franc CFA. M. Cissé a appelé à un engagement fort de l'État pour résorber ce "passif social".
Des systèmes existants aux ambitions d'inclusion
Bakary Diabaté de l'IPRES a détaillé l'architecture de la protection sociale au Sénégal, qui repose sur un volet contributif (IPRES, CSS) et un volet non contributif (filets sociaux, bourses familiales, CMU, etc.). Il a précisé que le Sénégal a adopté l'approche basée sur les droits en 2015. Selon M. Diabaté, l'ambition du gouvernement d'élargir la couverture au secteur informel s'est traduite par des initiatives telles que le Régime simplifié pour les petits contributeurs (RSPC). Une phase pilote pour les artisans est en cours, avec une extension progressive prévue pour les groupes organisés.
Abordant la question des faibles taux de pensions, M. Diabaté a mis en lumière le rôle crucial et complémentaire des assureurs. Il a expliqué que le régime de répartition de l'IPRES, avec une cotisation plafonnée, aboutit à des pensions modestes pour les hauts salaires. Il a souligné l'importance pour les travailleurs de souscrire à une assurance complémentaire pour garantir leur sécurité financière après la retraite. "Si vous avez 1 million [de salaire], l'IPRES prend seulement 432 000 francs qui est l'assiette de cotisation maximale, ce qui vous donne droit à une pension en moyenne de 84 000 F par mois," a-t-il illustré, insistant sur le fait qu'un salarié récupère l'intégralité de ses cotisations à l'IPRES en seulement cinq ans de perception de pension.
Réformes et revalorisation des pensions des fonctionnaires
Abou Aw, Directeur des pensions du Fonds National des Retraites (FNR), a présenté le système de retraite des fonctionnaires, structuré par un cadre juridique, institutionnel et financier rigoureux. Il a mentionné les instructions des plus hautes autorités en faveur de la revalorisation des pensions, citant la signature récente du pacte national de stabilité sociale.
M. Aw a également détaillé les causes de la dégradation du taux de remplacement des pensions, en particulier pour les hauts cadres, qui font face à de réels problèmes de pouvoir d'achat à leur retraite. Selon lui, des réformes sont en cours pour améliorer l'assiette de cotisation et développer un régime complémentaire par capitalisation. Il a, toutefois, prévenu que cela pourrait impacter les salaires et nécessiterait une communication approfondie avec les usagers et le patronat.
Consensus et pistes pour l'avenir
En synthèse, Biram Ndeck Ndiaye a souligné que la sécurité financière englobe également la santé, la maternité, l'invalidité et les accidents du travail. Il a réaffirmé la nécessité d'une assurance universelle et inclusive, protégeant les populations vulnérables et répondant aux nouvelles demandes de couverture. Les échanges avec les participants ont été vifs. Ibnou Sougoufara de Dangote a insisté sur l'urgence d'une protection sociale inclusive face à l'urbanisation rapide et à l'augmentation de l'espérance de vie. Il a plaidé pour une réforme du système, donnant plus de pouvoir aux assureurs et aux institutions financières, l'État se concentrant sur la sécurisation des fonds de pension. Il a même suggéré la mise en place d'un fonds de garantie couvrant l'éducation, soulignant l'insoutenabilité du système qui prévaut dans les universités publiques du Sénégal.
Lors des débats plusieurs points clés ont fait l’objet de consensus. La protection sociale, la maladie, et surtout la retraite, sont une nécessité impérieuse. La complémentarité entre les systèmes publics (IPRES, FNR) et les assureurs privés est désormais largement acceptée. La réflexion doit se concentrer sur les réformes paramétriques et institutionnelles pour améliorer le niveau des pensions. Il est crucial de plaider auprès des autorités publiques pour l'instauration d'un régime de retraite complémentaire obligatoire pour tous les travailleurs.
Des pistes de collaboration entre la Caisse des dépôts et consignation (CDC) et les acteurs de la protection sociale ont été esquissées, notamment la création d'un fonds fiduciaire et l'investissement dans des secteurs rentables comme l'énergie. La retraite complémentaire volontaire a été identifiée comme une démarche individuelle et collective, nécessitant une collaboration avec les syndicats de la fonction publique.
Les assureurs au cœur de la refonte
Le panel a souligné le rôle central que les assureurs doivent jouer dans tout projet de protection sociale étatique. L'extension de la couverture aux produits et aux personnes est une nécessité absolue, tout comme la revalorisation des pensions par la complémentarité des organismes. L'établissement d'un cadre de collaboration, le benchmarking des exemples réussis, l'adaptation de la réglementation et la promotion de produits innovants, tels que la rente d'éducation, sont autant de leviers pour bâtir une protection sociale solide et sécurisante. L'idée de rendre la retraite complémentaire obligatoire, en confiant aux assureurs le déploiement de l'assurance-vie, est désormais sur la table pour garantir une décence financière aux travailleurs après leur retraite.
Lejecos Magazine Août 2025


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