PRODUCTION HYDROELECTRIQUE DE MANANTALI : L’enjeu majeur d’une répartition

Mardi 13 Mai 2025

Le réseau du Mali est historiquement plus dépendant de Manantali et le barrage hydroélectrique est situé sur son territoire. C’est ce qui explique la part de 52 % allouée au Mali dans la clé de répartition entre les pays membres dont les enjeux sont cruciaux.


La clé de répartition de l'énergie produite par le barrage hydroélectrique de Manantali entre les trois pays membres de l'Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal (OMVS) reflète les besoins énergétiques et les infrastructures de chaque pays. Avec une puissance de 200 MW, la centrale de Manantali produit en moyenne 800 GWh par an. Elle est reliée aux réseaux électriques des trois pays par un réseau de transport à haute tension de plus de 1 700 km, comprenant 12 postes de transformation.

Aussi la décision de céder 52% au Mali, 33% au Sénégal et 15% à la Mauritanie a-t-elle été établie pour garantir une distribution équitable de l'énergie produite, en tenant compte des besoins spécifiques et des capacités de consommation de chaque pays. Il faut rappeler que le Sénégal a une puissance de pointe qui représente plus de 1 000 MW, contre à peu près 400 MW pour le Mali et près de 200 MW pour la Mauritanie. Le quota de chaque pays est étalée sur l’année et chacun choisit de prendre selon ses besoins durant l’année, avec un arbitrage de la SEMAF.

Concernant Senelec, son parc de production est essentiellement thermique avec un peu moins de 30% d’énergie renouvelable qui n’est au demeurant disponible que dans la journée (intermittence) pour le solaire.

Les enjeux de la répartition de l'énergie produite par le barrage hydroélectrique de Manantali sont à la mesure de la souveraineté énergétique. Le Mali dépend fortement de Manantali pour assurer sa base de production et, une remise en question des clés pourrait fragiliser sa sécurité énergétique dans un contexte d’instabilité.

Il y a peu, l’ancien Directeur général de la Semaf, Abdoulaye Dia, nous expliquait que « A la création de l’OMVS, la Guinée était partie prenante mais à un moment de l’histoire, elle s’était retirée, ce qui fait qu’au moment de construire Manantali, Félou et Gouina, elle n’y était pas et c’est ce qui explique qu’elle ne bénéficie pas de l’énergie de ces trois centrales. La Guinée a par la suite rejoint l’OMVS et aujourd’hui, elle est membre à part entière notamment au niveau du Haut-Commissariat, même si elle ne l’est pas encore au niveau de la SOGEM, SEMAF, etc… » C’est pourquoi, ajoutait-il, « L’OMVS a créé la SOGEOH qui est l’équivalent de la SOGEM en Guinée et qui doit réaliser le barrage de Koukoutamba (et d’autres barrages) ; ce barrage aura une puissance de 294 MW et sera la plus grande centrale du système ».
 
Esprit de solidarité

Pour la centrale de Félou (fleuve Sénégal, à 16 km au sud-est de Kayes) avec 60 MW, la clé de répartition est de 45% pour le Mali, 30% pour la Mauritanie et 25% pour le Sénégal, tandis que pour la centrale de Gouina (fleuve Sénégal au Mali, à 80 km au sud-est de Kayes), d’une puissance de 140 MW, la clé de répartition est de 33% pour la Mauritanie et le Sénégal et 34% pour le Mali. Pour Koukoutamba (294 mégawatts) situé de l'autre côté du fleuve Bafing, affluent du fleuve Sénégal, en république de Guinée, il a été décidé de céder 25% à chacun des quatre pays de l’OMVS dont la Guinée. In fine, en combinant les différents quotas pour les pays, sur les trois centrales, on obtient 45% pour le Mali,  30% pour le Sénégal et 25% pour la Mauritanie. Cette répartition fait suite d’abord à une étude globale sur la répartition des coûts et bénéfices réalisée par l’OMVS et qui tient compte de tous les projets et avantages associés à la ressource en eau. Les clés sont discutées par les Etats dans un esprit de solidarité. Aussi, si un pays ne paie pas ou consomme plus que sa part, cela déséquilibre le système et peut conduire à des tensions avec la SOGEM/SEMAF.

Il s’y ajoute que pour l’électricité, il est préférable qu’elle soit consommée le plus près possible des centrales pour réduire les pertes de transport ; c’est ce qui explique la plus grande part du Mali en plus du fait que les sites appartenaient au Mali qui a décidé de les mettre à la disposition de l’OMVS. Cependant, chaque pays y trouve son compte puisqu’il y a une péréquation globale qui ne considère pas que l’énergie. Il y a d’autres avantages comme le partage d’expériences, l’établissement de relations humaines, le soutien mutuel, avantages importants qu’on ne peut pas quantifier.

Par ailleurs, les clés de répartition influencent les flux transfrontaliers dans le réseau OMVS et leur intégration au WAPP (marché régional de l’électricité). Une clé mal respectée ou contestée compliquerait la gestion des échanges sur le réseau sous-régional.
 Malick NDAW
Actu-Economie


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