Madame la Directrice, comment se porte UMOA-Titres et quelles sont les statistiques consolidées à fin 2024 ?
Au regard des missions qui lui ont été assignées, je peux dire qu’UMOA-Titres se porte bien, et continue de jouer sa partition dans le cadre du développement et du fonctionnement optimal du Marché des Titres Publics(MTP) au service des économies des États membres de l’UEMOA. En effet, en dépit d’un contexte de marché difficile marqué notamment par l’incidence négative de la persistance des tensions économiques mondiales, et celle des crises géopolitiques et sécuritaires dans la sous-région, le Marché des Titres Publics fait encore preuve de résilience. C’est ainsi que, sur l’année 2024, le volume total des ressources levées par voie d’adjudication s’est établi à 8 127 milliards de FCFA pour l’ensemble des huit Etats de l’Union, soit une hausse de 13% par rapport au volume global mobilisé l’année précédente. Quant à l’encours des titres, il est passé de 14 571 milliards en 2023 à 17 901 milliards en glissement annuel, soit une progression de près de 23%.
La diversification des sources de financement constitue aujourd’hui un impératif pour les Etats, au regard des niveaux d’endettement publics. Quelles sont les stratégies de UMOA-Titres pour s’adapter à ces défis ?
Eu égard à la hausse des besoins de financement des économies de l’Union, la diversification des sources de financement s’avère effectivement cruciale. A cet effet, UMOA-Titres joue sa partition en accompagnant cette dynamique à travers plusieurs axes stratégiques en cours de développement.
D’abord par l’approfondissement et l’élargissement de la base des investisseurs, en menant des actions visant à renforcer la participation des investisseurs habituels, mais aussi à promouvoir la participation des investisseurs étrangers, des investisseurs institutionnels locaux, tels que les compagnies d’assurance, les caisses de retraites, les grandes entreprises de l’Union (public et privé) et les personnes physiques.
Ensuite en initiant des projets de diversification des instruments usités par les émetteurs, pour atteindre plusieurs catégories d’investisseurs notamment à travers l’émission d’instruments innovants (ESG Bonds, Project Bonds, …). La mise en place d’un cadre d’émissions d’instruments compatibles avec les règles de la finance islamique et des Diaspora Bonds est également en cours d’étude.
Ces initiatives sont essentielles pour renforcer les bases d’un financement soutenable des économies de notre Union.
Les opérations de rachat de dette souveraine sont de plus en plus utilisées par certains Etats. Pouvez-vous nous expliquer en langage simple le processus et les implications ?
Les opérations de rachat et d’échanges de titres sont généralement exécutées dans le cadre de la stratégie de gestion active de la dette, arrêtée par chaque Etat. Elles constituent des bonnes pratiques inspirées des marchés les plus développés. S’agissant spécifiquement des opérations d’échanges de titres (bien plus courantes sur le MTP), elles consistent pour l’investisseur à céder un titre précédemment émis contre l’acquisition d’un nouveau titre. Ce type d’opération vise principalement :
• refinancer à de meilleures conditions la dette existante ;
• retirer de la circulation les titres peu liquides ;
• rallonger la durée de vie du portefeuille de dette ;
• gérer les risques (autant pour l’émetteur que pour l’investisseur) Concrètement, cela fonctionne comme suit :
• L’État identifie des titres en circulation dont les caractéristiques ne sont plus en phase avec les réalités du marché ou dans le cadre de sa stratégie de gestion de risques.
• Ensuite, une offre est faite aux détenteurs de ces titres en vue de les racheter et de les remplacer par de nouveaux titres plus en « phase » avec la stratégie de l’émetteur ou la situation prévalant sur le marché financier ;
• Enfin, une fois les conditions arrêtées d’un commun accord entre les parties concernées, l’opération est réalisée dans l’infrastructure de marché (SAGETIL-UMOA) de façon transparente et simultanée (émission et rachat).
90% des titres souverains émis sur le marché sont détenus quasi-exclusivement par les acteurs du secteur bancaire, ne craignez-vous pas un effet d’éviction ? Par ailleurs, cela pose encore la problématique de l’élargissement de la base des investisseurs et donc de la liquidité du marché, quels sont alors les obstacles à ce qui apparaît comme une nécessité ?
Il est vrai que le couple rendement-risque qu’offre les titres publics génère un intérêt certain auprès des investisseurs. Selon les dernières informations disponibles dans le dernier rapport de politique monétaire publié par la BCEAO en décembre 2024, la part des titres publics dans les créances intérieures détenues par les banques représente environ 35%. Aussi, il ne parait pas raisonnable de s’inquiéter d’un éventuel risque d’éviction. Mais les proportions sus-évoquées devraient alimenter les réflexions sur la nécessité de l’élargissement et la diversification de la base des investisseurs, afin de réduire, comme vous l’évoquez, la concentration sur le secteur bancaire.
En effet, la problématique de la concentration de la détention et de l’investissement est d’autant plus accrue, dans la mesure où le secteur financier non-bancaire est peu développé dans l’Union, et que le niveau de l’épargne intérieure privée y est assez limité. Par ailleurs, les investisseurs institutionnels les plus actifs sur le marché tels que les compagnies d’assurance et les caisses de retraites investissent une part importante de leurs actifs dans des placements immobiliers, ainsi que sur des produits de dépôts à terme (DAT). A cet effet, plusieurs activités visant à juguler les obstacles à la diversification de la base des investisseurs sont menées.
Il s’agit d’abord et notamment de l’extension de l’accès à SAGETIL-UMOA (plateforme de transactions des titres publics sur les marchés primaire et secondaire) aux Sociétés de Gestion et d’Intermédiation (SGI) de l’UEMOA, ce qui leur permet de jouir d’une indépendance et d’une flexibilité dans la gestion des besoins de leur clientèle.
Ensuite de l’élaboration de campagnes de promotions et de vulgarisation du MTP auprès des investisseurs non bancaires, afin de renforcer la culture financière et de présenter les titres publics comme une alternative crédible pour leurs besoins d’investissement.
Enfin, l’éducation des différentes catégories d’acteurs du marché (agents du Trésor, investisseurs, journalistes, grand public...) au travers de programmes de formation spécifiques ; sans oublier la mise en place d’une plateforme électronique de cotation et de transaction des titres publics sur le marché secondaire devant contribuer à l’amélioration de la liquidité du marché et à terme son approfondissement.
Au demeurant, il y a lieu de souligner la nécessité du renforcement des actions visant à canaliser davantage l’épargne intérieure détenue par les agents économiques en dehors du circuit bancaire (circulation fiduciaire) vers des supports ou produits réglementaires, à travers notamment la promotion de l’inclusion financière.
Pourquoi est-il si difficile d’approfondir le marché ?
L’approfondissement du marché financier régional demeure au centre des préoccupations des Autorités de l’Union. Il est à relever que plusieurs composantes sont nécessaires pour bâtir et développer un marché financier. Il s’agit notamment de mettre en place un cadre juridique et réglementaire efficace et flexible. Il faut aussi, développer successivement un marché monétaire, un marché primaire et un marché secondaire, tout en disposant d’une base d’investisseurs suffisamment diversifiée, ainsi que d’une infrastructure du marché financier (IMF) robuste. La profondeur et la liquidité du marché dépendent ainsi du niveau de développement de ces composantes, sachant qu’un marché profond permet de réduire le coût des opérations et se caractérise entre autres, par une détermination fiable des prix, un taux de rotation élevé des titres, et des instruments négociés tout le long de la courbe des rendements.
Au niveau de la zone UEMOA, le marché primaire fonctionne correctement avec des émissions régulières, des pratiques en matière de communication, de transparence et de fiabilité en constante amélioration. L’infrastructure ainsi que le cadre réglementaire sont aussi adéquats. S’agissant du marché secondaire, le déploiement de la plateforme électronique de cotation et de transaction devrait permettre d’en accélérer le développement. En ce qui concerne le marché monétaire (notamment le compartiment interbancaire) plusieurs initiatives et réformes sont également en cours pour renforcer ses performances.
La transition verte est un enjeu de taille pour les pays de l’Union dans un contexte de lutte contre le changement climatique. Comment UMOA-titres pourrait-elle contribuer à atteindre cet objectif ?
A l’instar des autres pays, la transition verte est effectivement un des enjeux majeurs des pays membres de l’UEMOA, au regard de son impact favorable avéré. A cet égard, UMOA-Titres encourage activement l’émission d’obligations vertes et durables sur le marché régional des titres publics, pour financer des projets en lien avec la transition énergétique, la gestion durable des ressources et l’adaptation aux changements climatiques. Dans ce cadre, nous collaborons avec les États membres et l’écosystème pour mener des réflexions sur la mise en place d’un cadre réglementaire et opérationnel adapté à leurs besoins, afin de faciliter l’émission de ces instruments innovants sur le marché local, conformément aux standards internationaux. Ceci permettra d’attirer des financements spécifiques, provenant notamment d’investisseurs éco-socialement responsables.
L’accès et la qualité de l’information financière est d’une importance capitale pour les investisseurs. Quelles sont les initiatives mises en œuvre par UMOA-Titres pour renforcer la transparence et la culture financière sur le Marché des Titres Publics ?
La transparence et la diffusion de l’information sont essentielles pour le fonctionnement optimal du marché des titres publics, en ce sens qu’elles contribuent à renforcer la confiance des investisseurs. A ce titre, nous publions régulièrement des informations et statistiques de marché sur notre site web et les réseaux sociaux. A titre d’exemple, nous pouvons citer les notes d’informations des émetteurs publiées annuellement, le bulletin statistique trimestriel, le rapport hebdomadaire des activités du marché primaire, le rapport mensuel sur les activités du marché secondaire, la liste des titres publics en vie, publiée mensuellement, etc.
Aussi, UMOA-Titres a mis en place plusieurs initiatives structurantes parmi lesquelles on peut citer premièrement : l’animation des webinaires et sessions de sensibilisation destinés à la fois aux professionnels du secteur financier et au grand public. Ces initiatives permettent d’améliorer la compréhension des mécanismes du marché et d’élargir la base des investisseurs potentiels. Deuxièmement en collaboration avec différents partenaires au rang desquels la Banque Mondiale, nous organisons régulièrement des formations dédiées aux personnels techniques des Trésors publics des États membres. Ces formations visent à renforcer leurs compétences en matière de gestion de la dette et de maîtrise des marchés financiers et des marchés obligataires en particulier. Enfin troisièmement, pour accompagner le renforcement de capacités des acteurs du marché, nous avons mis en place depuis 2019, une certification CISI-UMOA (Chartered Institute for Securities & Investment UMOA), structurée en deux modules. Cette certification offre aux étudiants et aux professionnels de la finance la possibilité de renforcer leurs connaissances des fondamentaux et des mécanismes avancés des marchés financiers et des marchés obligataires en particulier, contribuant ainsi à la professionnalisation du secteur. Ces actions illustrent notre engagement à rendre le marché plus accessible, transparent et attractif pour un large éventail d’acteurs.
Quels sont les principaux défis et les perspectives à court et moyen termes de UMOA Titres ?
Les principaux défis et perspectives demeurent en collaboration avec les Etats membres, la BCEAO et l’ensemble des acteurs du marché :
1-la finalisation et le lancement au cours des prochains mois de la plateforme de cotation et transaction devant permettre à moyen terme l’amélioration de la liquidité des titres publics sur le marché secondaire et la diffusion d’une courbe de taux issue des transactions sur ce segment de marché
2- l’élargissement de la base des investisseurs locaux avec une plus forte participation des investisseurs non bancaires, afin de démocratiser l’accès aux titres publics
3- le renforcement de l’attractivité des investisseurs étrangers sur le marché local de la dette, à travers des offres de produits innovants notamment les émissions en monnaie locale sur les marchés internationaux (offshore local currency bond), les émissions de titres ESG et d’autres émissions destinées à des projets spécifiques (Project Bond)
4- le renforcement des initiatives en faveur de l’éducation financière conformément au « Programme d’Education Financière de la BCEAO en faveur des populations de la zone UMOA » ;
5- l’accompagnement continu des États dans la mobilisation des ressources nécessaires et la gestion optimale de leur dette.
6- l’harmonisation de la fiscalité applicable aux titres publics dans l’Union, afin de fluidifier les opérations sur le marché primaire et secondaire et de renforcer davantage l’intégration du marché régional des titres publics.
Lejecos Magazine (Mai 2025)
Au regard des missions qui lui ont été assignées, je peux dire qu’UMOA-Titres se porte bien, et continue de jouer sa partition dans le cadre du développement et du fonctionnement optimal du Marché des Titres Publics(MTP) au service des économies des États membres de l’UEMOA. En effet, en dépit d’un contexte de marché difficile marqué notamment par l’incidence négative de la persistance des tensions économiques mondiales, et celle des crises géopolitiques et sécuritaires dans la sous-région, le Marché des Titres Publics fait encore preuve de résilience. C’est ainsi que, sur l’année 2024, le volume total des ressources levées par voie d’adjudication s’est établi à 8 127 milliards de FCFA pour l’ensemble des huit Etats de l’Union, soit une hausse de 13% par rapport au volume global mobilisé l’année précédente. Quant à l’encours des titres, il est passé de 14 571 milliards en 2023 à 17 901 milliards en glissement annuel, soit une progression de près de 23%.
La diversification des sources de financement constitue aujourd’hui un impératif pour les Etats, au regard des niveaux d’endettement publics. Quelles sont les stratégies de UMOA-Titres pour s’adapter à ces défis ?
Eu égard à la hausse des besoins de financement des économies de l’Union, la diversification des sources de financement s’avère effectivement cruciale. A cet effet, UMOA-Titres joue sa partition en accompagnant cette dynamique à travers plusieurs axes stratégiques en cours de développement.
D’abord par l’approfondissement et l’élargissement de la base des investisseurs, en menant des actions visant à renforcer la participation des investisseurs habituels, mais aussi à promouvoir la participation des investisseurs étrangers, des investisseurs institutionnels locaux, tels que les compagnies d’assurance, les caisses de retraites, les grandes entreprises de l’Union (public et privé) et les personnes physiques.
Ensuite en initiant des projets de diversification des instruments usités par les émetteurs, pour atteindre plusieurs catégories d’investisseurs notamment à travers l’émission d’instruments innovants (ESG Bonds, Project Bonds, …). La mise en place d’un cadre d’émissions d’instruments compatibles avec les règles de la finance islamique et des Diaspora Bonds est également en cours d’étude.
Ces initiatives sont essentielles pour renforcer les bases d’un financement soutenable des économies de notre Union.
Les opérations de rachat de dette souveraine sont de plus en plus utilisées par certains Etats. Pouvez-vous nous expliquer en langage simple le processus et les implications ?
Les opérations de rachat et d’échanges de titres sont généralement exécutées dans le cadre de la stratégie de gestion active de la dette, arrêtée par chaque Etat. Elles constituent des bonnes pratiques inspirées des marchés les plus développés. S’agissant spécifiquement des opérations d’échanges de titres (bien plus courantes sur le MTP), elles consistent pour l’investisseur à céder un titre précédemment émis contre l’acquisition d’un nouveau titre. Ce type d’opération vise principalement :
• refinancer à de meilleures conditions la dette existante ;
• retirer de la circulation les titres peu liquides ;
• rallonger la durée de vie du portefeuille de dette ;
• gérer les risques (autant pour l’émetteur que pour l’investisseur) Concrètement, cela fonctionne comme suit :
• L’État identifie des titres en circulation dont les caractéristiques ne sont plus en phase avec les réalités du marché ou dans le cadre de sa stratégie de gestion de risques.
• Ensuite, une offre est faite aux détenteurs de ces titres en vue de les racheter et de les remplacer par de nouveaux titres plus en « phase » avec la stratégie de l’émetteur ou la situation prévalant sur le marché financier ;
• Enfin, une fois les conditions arrêtées d’un commun accord entre les parties concernées, l’opération est réalisée dans l’infrastructure de marché (SAGETIL-UMOA) de façon transparente et simultanée (émission et rachat).
90% des titres souverains émis sur le marché sont détenus quasi-exclusivement par les acteurs du secteur bancaire, ne craignez-vous pas un effet d’éviction ? Par ailleurs, cela pose encore la problématique de l’élargissement de la base des investisseurs et donc de la liquidité du marché, quels sont alors les obstacles à ce qui apparaît comme une nécessité ?
Il est vrai que le couple rendement-risque qu’offre les titres publics génère un intérêt certain auprès des investisseurs. Selon les dernières informations disponibles dans le dernier rapport de politique monétaire publié par la BCEAO en décembre 2024, la part des titres publics dans les créances intérieures détenues par les banques représente environ 35%. Aussi, il ne parait pas raisonnable de s’inquiéter d’un éventuel risque d’éviction. Mais les proportions sus-évoquées devraient alimenter les réflexions sur la nécessité de l’élargissement et la diversification de la base des investisseurs, afin de réduire, comme vous l’évoquez, la concentration sur le secteur bancaire.
En effet, la problématique de la concentration de la détention et de l’investissement est d’autant plus accrue, dans la mesure où le secteur financier non-bancaire est peu développé dans l’Union, et que le niveau de l’épargne intérieure privée y est assez limité. Par ailleurs, les investisseurs institutionnels les plus actifs sur le marché tels que les compagnies d’assurance et les caisses de retraites investissent une part importante de leurs actifs dans des placements immobiliers, ainsi que sur des produits de dépôts à terme (DAT). A cet effet, plusieurs activités visant à juguler les obstacles à la diversification de la base des investisseurs sont menées.
Il s’agit d’abord et notamment de l’extension de l’accès à SAGETIL-UMOA (plateforme de transactions des titres publics sur les marchés primaire et secondaire) aux Sociétés de Gestion et d’Intermédiation (SGI) de l’UEMOA, ce qui leur permet de jouir d’une indépendance et d’une flexibilité dans la gestion des besoins de leur clientèle.
Ensuite de l’élaboration de campagnes de promotions et de vulgarisation du MTP auprès des investisseurs non bancaires, afin de renforcer la culture financière et de présenter les titres publics comme une alternative crédible pour leurs besoins d’investissement.
Enfin, l’éducation des différentes catégories d’acteurs du marché (agents du Trésor, investisseurs, journalistes, grand public...) au travers de programmes de formation spécifiques ; sans oublier la mise en place d’une plateforme électronique de cotation et de transaction des titres publics sur le marché secondaire devant contribuer à l’amélioration de la liquidité du marché et à terme son approfondissement.
Au demeurant, il y a lieu de souligner la nécessité du renforcement des actions visant à canaliser davantage l’épargne intérieure détenue par les agents économiques en dehors du circuit bancaire (circulation fiduciaire) vers des supports ou produits réglementaires, à travers notamment la promotion de l’inclusion financière.
Pourquoi est-il si difficile d’approfondir le marché ?
L’approfondissement du marché financier régional demeure au centre des préoccupations des Autorités de l’Union. Il est à relever que plusieurs composantes sont nécessaires pour bâtir et développer un marché financier. Il s’agit notamment de mettre en place un cadre juridique et réglementaire efficace et flexible. Il faut aussi, développer successivement un marché monétaire, un marché primaire et un marché secondaire, tout en disposant d’une base d’investisseurs suffisamment diversifiée, ainsi que d’une infrastructure du marché financier (IMF) robuste. La profondeur et la liquidité du marché dépendent ainsi du niveau de développement de ces composantes, sachant qu’un marché profond permet de réduire le coût des opérations et se caractérise entre autres, par une détermination fiable des prix, un taux de rotation élevé des titres, et des instruments négociés tout le long de la courbe des rendements.
Au niveau de la zone UEMOA, le marché primaire fonctionne correctement avec des émissions régulières, des pratiques en matière de communication, de transparence et de fiabilité en constante amélioration. L’infrastructure ainsi que le cadre réglementaire sont aussi adéquats. S’agissant du marché secondaire, le déploiement de la plateforme électronique de cotation et de transaction devrait permettre d’en accélérer le développement. En ce qui concerne le marché monétaire (notamment le compartiment interbancaire) plusieurs initiatives et réformes sont également en cours pour renforcer ses performances.
La transition verte est un enjeu de taille pour les pays de l’Union dans un contexte de lutte contre le changement climatique. Comment UMOA-titres pourrait-elle contribuer à atteindre cet objectif ?
A l’instar des autres pays, la transition verte est effectivement un des enjeux majeurs des pays membres de l’UEMOA, au regard de son impact favorable avéré. A cet égard, UMOA-Titres encourage activement l’émission d’obligations vertes et durables sur le marché régional des titres publics, pour financer des projets en lien avec la transition énergétique, la gestion durable des ressources et l’adaptation aux changements climatiques. Dans ce cadre, nous collaborons avec les États membres et l’écosystème pour mener des réflexions sur la mise en place d’un cadre réglementaire et opérationnel adapté à leurs besoins, afin de faciliter l’émission de ces instruments innovants sur le marché local, conformément aux standards internationaux. Ceci permettra d’attirer des financements spécifiques, provenant notamment d’investisseurs éco-socialement responsables.
L’accès et la qualité de l’information financière est d’une importance capitale pour les investisseurs. Quelles sont les initiatives mises en œuvre par UMOA-Titres pour renforcer la transparence et la culture financière sur le Marché des Titres Publics ?
La transparence et la diffusion de l’information sont essentielles pour le fonctionnement optimal du marché des titres publics, en ce sens qu’elles contribuent à renforcer la confiance des investisseurs. A ce titre, nous publions régulièrement des informations et statistiques de marché sur notre site web et les réseaux sociaux. A titre d’exemple, nous pouvons citer les notes d’informations des émetteurs publiées annuellement, le bulletin statistique trimestriel, le rapport hebdomadaire des activités du marché primaire, le rapport mensuel sur les activités du marché secondaire, la liste des titres publics en vie, publiée mensuellement, etc.
Aussi, UMOA-Titres a mis en place plusieurs initiatives structurantes parmi lesquelles on peut citer premièrement : l’animation des webinaires et sessions de sensibilisation destinés à la fois aux professionnels du secteur financier et au grand public. Ces initiatives permettent d’améliorer la compréhension des mécanismes du marché et d’élargir la base des investisseurs potentiels. Deuxièmement en collaboration avec différents partenaires au rang desquels la Banque Mondiale, nous organisons régulièrement des formations dédiées aux personnels techniques des Trésors publics des États membres. Ces formations visent à renforcer leurs compétences en matière de gestion de la dette et de maîtrise des marchés financiers et des marchés obligataires en particulier. Enfin troisièmement, pour accompagner le renforcement de capacités des acteurs du marché, nous avons mis en place depuis 2019, une certification CISI-UMOA (Chartered Institute for Securities & Investment UMOA), structurée en deux modules. Cette certification offre aux étudiants et aux professionnels de la finance la possibilité de renforcer leurs connaissances des fondamentaux et des mécanismes avancés des marchés financiers et des marchés obligataires en particulier, contribuant ainsi à la professionnalisation du secteur. Ces actions illustrent notre engagement à rendre le marché plus accessible, transparent et attractif pour un large éventail d’acteurs.
Quels sont les principaux défis et les perspectives à court et moyen termes de UMOA Titres ?
Les principaux défis et perspectives demeurent en collaboration avec les Etats membres, la BCEAO et l’ensemble des acteurs du marché :
1-la finalisation et le lancement au cours des prochains mois de la plateforme de cotation et transaction devant permettre à moyen terme l’amélioration de la liquidité des titres publics sur le marché secondaire et la diffusion d’une courbe de taux issue des transactions sur ce segment de marché
2- l’élargissement de la base des investisseurs locaux avec une plus forte participation des investisseurs non bancaires, afin de démocratiser l’accès aux titres publics
3- le renforcement de l’attractivité des investisseurs étrangers sur le marché local de la dette, à travers des offres de produits innovants notamment les émissions en monnaie locale sur les marchés internationaux (offshore local currency bond), les émissions de titres ESG et d’autres émissions destinées à des projets spécifiques (Project Bond)
4- le renforcement des initiatives en faveur de l’éducation financière conformément au « Programme d’Education Financière de la BCEAO en faveur des populations de la zone UMOA » ;
5- l’accompagnement continu des États dans la mobilisation des ressources nécessaires et la gestion optimale de leur dette.
6- l’harmonisation de la fiscalité applicable aux titres publics dans l’Union, afin de fluidifier les opérations sur le marché primaire et secondaire et de renforcer davantage l’intégration du marché régional des titres publics.
Lejecos Magazine (Mai 2025)