Le savoir contribue à changer le cours de l’histoire

Dimanche 2 Novembre 2014

Les exemples abondent en Afrique, illustrant comment le savoir contribue à changer le cours de l’Histoire, déclare Carlos Lopes à l’ouverture de la 9ème conférence économique africaine. Voici la synthèse de son discours
Dans son discours d’ouverture, le secrétaire général exécutif de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), Carlos Lopes a survolé quelques exemples d’innovations technologiques africaines qui ont changé ou qui peuvent changer le cours de l’histoire.
Et tout d’abord, l’expérience d’inclusion financière grâce aux services bancaires via la téléphonie mobile, cité aujourd’hui en exemple dans le monde entier. Le Kenya est leader mondial du M Banking.


Carlos Lopez, le secrétaire général de la Commission Economique pour l'Afrique(CEA)
Carlos Lopez, le secrétaire général de la Commission Economique pour l'Afrique(CEA)
M. Lopes cite aussi l’exemple du Cardiopad, développé par Arthur Zang, un ingénieur camerounais de 24 ans,qui permet de réaliser des examens du cœur au moyen d’une tablette. Il y a aussi le Saphonian, inventé par le Tunisien Anis Aouini, qui vise à offrir d’autres moyens d’exploiter la force du vent et de produire de l’énergie verte qui peut être transformée en électricité.
La liste est longue. Ainsi, en Afrique du Sud, une toilette actionnée par des pédales, autonome, facile à monter et qui fonctionne sans eau, appelée SavvyLoo, est lancée pour répondre aux besoins de solutions d’assainissement innovantes.
En Afrique de l’Est, Eneza (« atteindre » ou « diffuser » en kiswahili), un tuteur et assistant pédagogique virtuel sur téléphone mobile à bas prix, commence à faire parler de lui.
On peut aussi citer l’application mobile M-Farm, qui fournit des informations actualisées sur l’état du marché, met en lien agriculteurs et consommateurs sur un marché virtuel et indique les tendances les plus récentes en matière d’agriculture.
Ces innovations sont de bon augure pour l’avenir. Cependant, poursuit M. Lopes, des efforts supplémentaires sont encore nécessaires pour accélérer le rythme de création ainsi que la vitesse d’assimilation de ces nouvelles technologies, et pour les diffuser à tous les secteurs de nos économies.
Et de saluer la forte participation à cette conférence, un signe encourageant. “Vous, jeunes chercheurs ou professeurs déjà respectés, êtes ici pour apporter quelque chose. Vos institutions respectives continuent de créer des occasions de dialogue et d’échanges avec les dirigeants industriels du nouveau commerce africain, fondé sur le savoir et la technologie. Je ne saurais trop souligner le fait qu’il importe, dans notre quête de la transformation structurelle, de l’industrialisation et du développement durable du continent, de favoriser un dialogue continu entre ceux qui créent le savoir et ceux qui le commercialisent. Comme vous le savez, le partage a un effet démultiplicateur sur la diffusion du savoir”.
Le savoir, clé de la transformation économique
L’une des évolutions majeures qui a dynamisé le développement économique au XXe siècle a certainement été l’émergence et la consolidation de l’économie mondiale fondée sur le savoir. L’Afrique doit se tenir prête, avertit M. Lopes: “Nous pouvons en effet être des bénéficiaires nets de la priorité donnée au rôle de l’information, de la technologie et de l’apprentissage comme déterminant de la performance économique. Nous pouvons brûler des étapes et nous pouvons innover avec peu de moyens”.
La technologie, poursuit-il, a une grande incidence sur notre capacité de recenser les occasions qui se présentent et de les exploiter pour transformer nos économies, et sur l’employabilité de notre population jeune qui ne cesse d’augmenter. Dans cette économie mondiale mue par le savoir, une éducation axée sur l’innovation et la technologie est indispensable à des performances économiques et une compétitivité durables.
En pratique, un enseignement axé sur l’innovation et la technologie dispense à nos jeunes les fondamentaux à même de garantir leur avenir. Il assure leur intégration aux secteurs les plus productifs d’une économie et leur donne également la capacité de créer de nouveaux produits et secteurs. À cet égard, la Position africaine commune sur le programme pour l’après-2015 est claire: personne ne sera laissé pour compte. Le continent vise une croissance durable pour tous qui conduise à l’amélioration des conditions de vie de chaque Africain, sans exception: nous voulons que les ménages modestes soient capables de créer de la richesse, soit en montant une petite entreprise compétitive, soit en s’insérant dans la dynamique d’industrialisation. Pour ce faire, nous devons renforcer les compétences et les adapter aux besoins de l’emploi.
La population active doit donc acquérir un éventail de compétences afin de satisfaire à l’exigence de progrès et d’apprentissage constants. Nous évoluons aujourd’hui dans une économie de l’apprentissage. Nous devons nous adapter, donner à nos jeunes la possibilité de continuer à apprendre, et plus important encore, leur inculquer la culture de la recherche de solutions, qui sera le terreau d’idées innovantes. Il est évident que les pouvoirs publics et les établissements d’enseignement ont un rôle à jouer pour favoriser la diffusion de l’innovation dans toute l’économie.
Ebola, dure piqure de rappel
La crise Ébola en Guinée, au Libéria et en Sierra Leone nous rappelle la dure réalité des répercussions désastreuses que le manque de qualifications en Afrique a sur la progression économique des pays touchés. Je ne veux pas m’appesantir sur les occasions manquées par nos systèmes nationaux d’enseignement et d’innovation au sens large. Considérons simplement que nous nous sommes laissé prendre du retard en nous contentant de « copier-coller », sans tirer d’enseignements. Les faiblesses cumulées de nos systèmes éducatifs, de notre création de compétences et de notre innovation font peser une menace majeure sur nos ambitions de croissance durable et inclusive sur la scène mondiale actuelle.
Comment changer notre attitude ?
En nous assurant de choisir des investissements stratégiques et de considérer les dépenses sociales comme partie intégrante de notre investissement pour l’avenir. “Nous ne serons pas pris au sérieux si nous nous soucions uniquement de stimuler la croissance du PIB, sans la traduire au niveau qualitatif. Les pays qui saisissent la portée de l’enjeu sont ceux capables d’allier politiques ambitieuses et systèmes d’innovation dynamiques”.
Si j’ai l’air d’insister sur les termes de systèmes nationaux d’innovation, c’est que le bilan d’un pays en matière d’innovation repose essentiellement sur un système collectif de création de connaissances. Il dépend également de l’utilisation des connaissances acquises, de leur association à des technologies, ainsi que du type de technologies utilisées. Je tiens à souligner ici que les systèmes nationaux d’innovation peuvent et doivent être complétés et renforcés par des systèmes régionaux ET continentaux. Certains de nos pays sont légèrement plus avancés que d’autres. Par exemple, en 2014, plusieurs universités africaines, en Afrique du Sud, en Égypte et en Ouganda, figuraient dans le classement mondial du Centre for World University Rankings. Nous pouvons tirer des enseignements de leurs expériences. Dans le contexte de l’intégration régionale et dans sa réalisation, le partage des ressources me semble devoir jouer un rôle non négligeable.
Je suis convaincu que la plupart des gouvernements africains sont conscients de l’importance de la création de connaissances et de l’innovation. Mais cela ne suffit pas: ils ont besoin de mécanismes institutionnels qui permettront à la majorité de leurs citoyens d’en tirer des avantages directs.
La mobilisation des ressources financières nationales en vue de mener à bien les réformes nécessaires représente un enjeu majeur pour bon nombre de nos pays. De plus, la mise en place d’institutions et la création des connaissances, des compétences et de l’innovation nécessaires portent leurs propres enjeux de financement. Par exemple, la création de partenariats publics et privés pourrait être une solution. En effet, la requalification de notre main-d’œuvre s’effectue sur le lieu de travail, par le biais de programmes structurés visant à renforcer les compétences et dont l’entreprise est le moteur.
Lorsque cela est nécessaire, les entreprises parviennent déjà à trouver suffisamment de travailleurs qualifiés pour initier une faible valeur ajoutée. C’est déjà une bonne nouvelle, mais ce n’est guère encourageant. En satisfaisant de plus fortes exigences et en apportant plus de compétences, nous réussirons seulement à intensifier l’industrialisation. Il nous faut donc plus de synergie et de synchronisation entre les acteurs des secteurs public et privé.
Capacités et aptitudes sont deux choses différentes. Des aptitudes, nous en avons une multitude, mais nous avons besoin de capacités. Nous avons besoin de capacités en faveur d’une prise de décision stratégique. De capacités pour permettre l’essor des activités économiques productives. Des capacités d’absorption agressive et de création de technologies porteuses de connaissances. En un mot, de capacités à transformer la croissance en une croissance de qualité. Quel défi fantastique pour un groupe d’économistes africains de différentes générations !
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