Forum Forbes Afrique - Le système bancaire africain, un modèle inachevé

Lundi 28 Juillet 2014

Depuis le tsunami qui a frappé les banques de la Zone franc dans les années quatre-vingt, leur nombre a augmenté, impulsé par une libéralisation du secteur, une montée en puissance de l'africanisation des établissements, puis leur régionalisation et leur internationalisation. Du coup, les systèmes bancaires africains ont gagné en performance et en structuration, mais de nombreuses faiblesses persistent.


Le secteur financier africain reste confronté à des défis majeurs, notamment la faiblesse du taux de bancarisation surtout en milieu rural, et la variabilité des capitaux entre les pays africains. Il connaît d'autres faiblesses notamment en professionnalisation et innovation en matière de risque, de garantie, de montage, de transparence et de financement de l'habitat.
Par ailleurs, les banques africaines doivent, à travers les nouvelles technologies, prévenir les fraudes, améliorer la pénétration de leurs produits, conquérir de nouveaux publics, et drainer plus d'épargne en faisant plus de détail.
L'apparition de banques régionales sur la scène africaine doit inciter à plus de flexibilité, de proximité, d'anticipation des changements, compte tenu de leur connaissance de l'environnement et des marchés locaux. Par rapport aux banques européennes traditionnelles, elles peuvent facilement introduire de nouveaux produits répondant aux besoins de leurs clients.
Le Mobile Banking, une innovation en voie de réussite
La téléphonie mobile s'est révélée un instrument capable de développer le taux de bancarisation, en réduisant les contraintes géographiques et les coûts de transaction. Par rapport à la banque traditionnelle, le Mobile Banking est immédiat, et a modifié le modèle économique du service, notamment en réduisant les coûts de transactions financières. Il peut, entre autres, être utilisé comme guichet automatique et comme terminal de point de vente grâce à la carte SIM, ainsi que de point de dépôt et de retrait d'argent liquide.
L'économiste en chef de la Banque africaine de développement (BAD), Peter Ondiege, pense que sa croissance reste exponentielle, ses frontières pouvant être élargies et ouvertes à l'inventivité.
L'asymétrie de l'information bancaire et son manque de transparence
L'environnement africain subsaharien est caractérisé par une asymétrie. Les banques africaines en général manquent d'éléments permettant d'identifier les risques des projets. Ce qui les pousse parfois à adopter une attitude prudentielle. Diverses améliorations sont donc souhaitables, voire indispensables, de leur activité, par exemple sur le plan réglementaire en vue d'assouplir le dispositif.
Les banques de la Zone franc ont également besoin d'informations statistiques et d'une harmonisation au niveau sous-régional pour une bonne lecture de leur environnement sectoriel, et de s'inspirer si nécessaire des pratiques utilisées au sein du système financier informel, notamment les tontines. À ces différents titres, elles peuvent initier des réflexions avec l'Observatoire économique et statistique subsaharienne (Afristat), le Programme régional d'appui à la statistique (Parstat), l'Organisation et l'harmonisation du droit des affaires en Afrique (Ohada), le secteur des microcrédits, etc.
En Zone franc -- et ailleurs --, il peut arriver que des entreprises privées à qui l'État et le secteur privé ont passé des commandes ne puissent honorer leurs engagements envers les banques. En accumulant les arriérés de paiement, l'État masque le déficit public en le transférant au système bancaire. Or les banques communiquent rarement sur ce mode d'action et sur les arriérés de paiement. Il convient donc de redéfinir la politique monétaire et de réfléchir à une restructuration du système bancaire, avec de nouvelles lois bancaires.
La surliquidité des banques, un mal propre à l'Afrique subsaharienne
L'Afrique souffre d'une surliquidité bancaire, un puissant frein à son développement économique. Les établissements bancaires africains préfèrent conserver leurs liquidités plutôt que de prêter l'épargne collectée pour financer les projets d'investissement des entreprises. Cette réticence résulterait, d'après les banques, du manque de projets d'investissement bancables, de lacunes en matière de normes comptables et d'un système judiciaire faiblement développé et souvent incapable de régler les litiges potentiels entre prêteurs et emprunteurs.
Le système bancaire de la Zone franc a besoin du soutien l'État
Les gouvernements africains, avec l'appui des institutions financières internationales comme la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, doivent « contraindre », si nécessaire, les banques, à travers un cadre légal, à orienter cette épargne au profit de l'investissement. Cela passe par l'amélioration du cadre normatif comptable et d'un système judiciaire « sain », réglementant les litiges. Pour le moment, les États utilisent une seule stratégie, efficace, mais limitée, pour contourner cette surliquidité, à savoir les bons du Trésor, à leur seul avantage et pas à celui du secteur privé.
En revanche, les banques ont besoin de l'État pour améliorer le fonctionnement de la justice, en utilisant les incitations fiscales ou la mise en place d'une législation adaptée. Un volontarisme politique est donc nécessaire pour une harmonisation et une convergence des économies pour atteindre une masse critique pouvant viser le marché international.
C'est en acceptant l'orthodoxie des normes internationales que le secteur bancaire africain pourra évoluer, que l'Afrique pourra conforter son image et façonner son propre cadre stratégique dans les voies novatrices qu'elle aura choisies pour peu que le contexte politique soit stable et favorise les mutations qu'il engage.
Les Dépêches de Brazzaville/allafrica.com
 
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