ÉLECTRICITE EN AFRIQUE - 600 millions de personnes toujours privées d’accès : 700 000 décès évitables chaque année

Mardi 30 Septembre 2025

Des centaines de millions d’africains vivant encore sans électricité, dépendent du pétrole, des bougies et du bois de chauffage. Selon la Commission économique pour l’Afrique (Cea), le coût se mesure en croissance stagnante, en opportunités manquées et en environ 700 000 décès évitables chaque année. « Des politiques plus fortes, un financement plus équitable et de nouvelles technologies peuvent-ils enfin inverser la tendance ? », s’interroge la Cea.


Le chiffre souvent cité de 600 millions d’Africains privés d’électricité est devenu alarmant, souligne la Commission. Signalant que répété dans les rapports et les conférences, ce chiffre risque d’engendrer une lassitude statistique. « Pourtant, dans les foyers, les hôpitaux et les entreprises, les effets restent douloureusement visibles », rapporte un communiqué de la Cea.

Le texte explique que les familles font usage des lampes à pétrole, exposant les enfants à des vapeurs toxiques. Les infirmières peinent à réfrigérer les vaccins, à alimenter les incubateurs ou à assurer des livraisons sûres pendant les pannes de courant. Les commerçants perdent des marchandises lorsque les congélateurs dégèlent, tandis que les commerçants sont contraints de fermer à la tombée de la nuit.

« L’Organisation mondiale de la santé  estime que la pollution de l’air intérieur due aux combustibles polluants tue 3,2 millions  de personnes dans le monde chaque année, dont plus de 237 000 enfants de moins de cinq ans », souligne la Cea. A l’en croire, en Afrique, ce bilan s’élève à environ 700 000 décès par an, causés par des pneumonies, des maladies cardiaques, des maladies respiratoires chroniques, des accidents vasculaires cérébraux et des cancers du poumon.

Le fardeau est le plus lourd au Nigéria, où plus de 80 millions de personnes sont privées d’électricité, soit le plus grand nombre au monde. La République démocratique du Congo et l’Éthiopie en comptent 130 millions supplémentaires. Ensemble, ces trois pays représentent près d’un tiers des Africains vivant encore dans le noir.

Sans électricité, les espoirs de création d’emplois, de production à valeur ajoutée et d’exportations compétitives restent inaccessibles.
Pour la Pdg et représentante spéciale des Nations Unies pour l’énergie durable pour tous (SEforALL), Damilola Ogunbiyi, le premier obstacle réside dans les politiques et les finances. Elle a souligné la nécessité de mettre en place des cadres nationaux solides et des financements concessionnels pour les soutenir.

« Chez SEforAll, l’un des principaux changements a été de passer des engagements à leur mise en œuvre concrète », a-t-elle déclaré, soulignant la nécessité de traduire les promesses en résultats. En collaboration avec le Programme des Nations Unies pour l’énergie, SEforALL suit chaque année les progrès réalisés, depuis les nouvelles bornes de recharge pour véhicules électriques jusqu’aux gains d’électrification plus larges et à leur impact.

Mme Ogunbiyi a souligné que si la transition se dit progressive pour de nombreux pays, l’Afrique doit « saisir l’opportunité » de construire un avenir énergétique plus vert dès le départ.
Cette opportunité, cependant, s’éloigne. Le Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Afrique, Claver Gatete, a souvent déploré que le continent reçoive moins de 3 % des investissements mondiaux dans l’énergie, alors qu’il détient 60 % du potentiel solaire mondial.

« Le déficit de financement menace d’enfermer l’Afrique dans des solutions à court terme plutôt que dans des solutions à long terme », a mis en garde M. Gatete.

Le Directeur de la Division de la technologie, de l’innovation, de la connectivité et des infrastructures à la Cea, Robert Lisinge, a déclaré que la Commission collabore avec l’Union africaine, la SADC  et d’autres organismes pour élaborer des cadres tels que la Politique continentale de sécurité énergétique et la Politique de transition énergétique juste de la SADC. L’objectif, a-t-il précisé, est d’aligner les stratégies nationales sur les ODD  et l’Agenda 2063, tout en veillant à ce que les priorités énergétiques de l’Afrique ne soient pas reléguées au second plan dans les débats mondiaux.

Mais la situation n’est pas si sombre en Afrique. Le Kenya a réalisé des progrès louables et reproductibles, produisant plus de 80 % de son électricité à partir d’énergies renouvelables. Le Complexe Noor Ouarzazate  du Maroc mérite également d’être mentionné ; il est souvent cité parmi les plus grandes installations solaires au monde.

L’énergie nucléaire est également au cœur du débat énergétique africain. M. Lisinge a noté que plus de 20 pays envisagent des petits réacteurs modulaires et des micro-réacteurs comme options pour l’électrification rurale. Cette technologie reste controversée, avec des interrogations quant à son coût, sa sécurité et sa production de déchets.

Cependant, les défenseurs de l’énergie nucléaire soulignent que des pays comme la France et le Canada utilisent depuis longtemps le nucléaire comme source fiable d’énergie à faible émission de carbone et affirment qu’une réglementation adéquate pourrait compléter les énergies renouvelables et fournir la charge de base stable dont l’Afrique a besoin pour sa croissance.
Bassirou MBAYE
Actu-Economie


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