Afrique: La création de la banque du BRICS change l'ordre financier et économique mondial

Vendredi 25 Juillet 2014

New Delhi — Le sixième Sommet du BRICS qui vient de s'achever au Brésil marque la transition d'un regroupement basé jusqu'à présent sur des préoccupations partagées vers celle basée sur des intérêts communs.


Afrique: La création de la banque du BRICS change l'ordre financier et économique mondial
Depuis la création du BRICS (rassemblant le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine et l'Afrique du Sud) en 2009, il a été vu principalement comme un exercice de brandissement de drapeau par un groupe de pays émergents influents, avec peu de choses en termes d'intérêt convergent autre que la signalisation de leur fort mécontentement de la domination persistante occidentale de l'ordre économique, financier ainsi sécuritaire mondial, mais incapables de concevoir eux-mêmes des structures de gouvernance alternatives crédibles.
Cependant, avec le Sommet de Fortaleza annonçant enfin la création tant attendue de la Nouvelle banque de développement (NDB) avec un capital souscrit de 50 milliards de dollars et un Arrangement pour une réserve de prévoyance (CRA) de 100 milliards de dollars, le statut de monopole et le rôle des institutions de Bretton Woods - la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI) - reste brisé.
Certes, il peut prendre à la NDB et au CRA beaucoup de temps et d'expérience pour devenir des institutions financières internationales crédibles mais c'est clairement cela l'intention.
Les dirigeants du BRICS ont gardé la porte ouverte à d'autres acteurs, mais conserveront au moins un titre de participation de 55 pour cent.
Ils ont également pris soin de déclarer que ces nouvelles institutions compléteront les activités de la Banque mondiale et du FMI, cela a également été la première réponse de ces dernières.
Néanmoins, l'émergence d'une source alternative de financement avec des normes différentes de celles suivies par les institutions établies changera le paysage financier mondial de manière irréversible.
On peut noter pour l'avenir que l'une des composantes de l'infrastructure financière mondiale dans laquelle les entreprises occidentales restent encore dominantes est le secteur de l'assurance et de la réassurance.
Les flux du commerce mondial, en particulier les flux énergétiques sont presque toujours assurés par une poignée de compagnies occidentales qui déterminent également les facteurs de risque et les primes.
Au Brésil, les pays du BRICS ont notifié qu'ils examineront la possibilité de mettre en commun leurs capacités dans ce secteur. Une situation plus concurrentielle dans ce secteur ne peut qu'être un développement positif pour les pays en développement.
Les initiatives du BRICS sont nées de la frustration grandissante parmi les pays émergents que même une restructuration modeste des structures de gouvernance des institutions de Bretton Woods, pour tenir compte de leur profil économique croissant, rencontrait une résistance.
L'engagement pris en 2010 lors du sommet du G20 d'élargir leur participation dans le FMI reste insatisfait, la restructuration de la Banque mondiale n'a pas encore commencé.
Plus le retard dans cette restructuration dure, plus la consolidation des nouvelles institutions du BRICS est susceptible d'être rapide.
C'est ce facteur qui a joué un rôle dans la résolution de certaines des différences entre les pays du BRICS par rapport à la structure et la gouvernance de ces institutions proposées.
La création des institutions du BRICS doit beaucoup à l'énergie et au dynamisme affichés par la Chine. Il est douteux que ces propositions aient été actualisées si la Chine n'avait pas mis tout son poids derrière elles et n'avait pas montré une volonté d'accueillir d'autres pays membres, en particulier l'Inde.
La Russie est devenue plus enthousiaste après avoir été exclue du G8 et soumises à des sanctions occidentales.
L'activisme chinois sur ce point doit être considéré dans le contexte d'autres développements parallèles dans lesquels la Chine a également été l'instigatrice et parfois l'initiatrice. Il s'agit de:
1. La proposition de création d'une Banque asiatique pour l'investissement dans l'infrastructure (AIIB) pour financer des projets d'infrastructure et de connectivité en Asie, en particulier, ceux qui aideraient à relancer les "Routes de la soie" maritimes et terrestres reliant la Chine avec ses deux flancs est et ouest. Le parallèle avec la NDB est difficile à laisser passer.
2. La consolidation de la Multilatéralisation de l'initiative de Chiang Mai (CMIM) et l'Organisation asiatique de recherche multilatérale (AMRO) associée entre l'Association des nations d'Asie du sud-est (ASEAN) + 3 (Chine, Japon et République de Corée).
La CMIM est aujourd'hui un mécanisme de financement de 240 milliards de dollars pour aider les pays membres à faire face aux difficultés de balance des paiements. Ceci est similaire au CRA de 100 milliards de dollars créé les pays du BRICS.
L'AMRO est devenue un mécanisme pour la surveillance macro-économique des pays membres et fournit un repère pour leur santé et leur performance économiques. Cela permettrait des politiques de crédit saines et peut très bien être lié à l'avenir à l'AIIB. Le CMIM et l'AMRO fournissent ainsi des composantes qui pourraient servir de modèle pour la NDB, le CRA et l'AIIB.
3. Outre la CMIM et l'AMRO, il existe des initiatives en cours au sein de l'ASEAN + 3 pour développer un véritable Marché obligataire asiatique qui pourrait mobiliser les économies régionales dans des investissements régionaux à travers des obligations en monnaie locale.
Pour soutenir cette initiative, un Mécanisme régional de garantie de crédit et d'investissement a été créé. Un Intermédiaire régional de règlement est proposé pour faciliter les transferts multidevises transfrontaliers.
Ces développements sont en cours juste au moment où il y a un marché obligataire chinois dominé par le yuan en croissance rapide, les soi-disant obligations dim-sum, qui sont devenues une source importante de financement des entreprises.
Cela réduit la dépendance des obligations dominées par l'euro et le dollar américain. La NDB pourrait puiser dans ce marché pour développer ses propres finances.
Il est important de garder à l'esprit cette image plus large dans l'évaluation de l'importance des décisions prises lors du Sommet de Fortaleza.
En poursuivant systématiquement un certain nombre d'initiatives parallèles, la Chine tente de créer une infrastructure alternative de financement qui la verrait jouer le rôle principal.
Le dilemme pour d'autres pays émergents est qu'il semble ne pas exister une alternative crédible, d'autant plus que les pays occidentaux ne sont pas disposés à leur céder un rôle accru quelconque.
Le Sommet de Fortaleza marque le début de la fin de la domination par l'Occident de l'ordre économique et financier mondial après la Seconde Guerre mondiale. Les institutions existantes devront désormais partager l'espace avec les nouvelles venues et peuvent être contraintes d'adapter leurs normes pour rivaliser avec ces dernières.
Le principal instigateur derrière création d'un réseau rival d'institutions financières est la Chine, dont le profil et l'influence dans le monde sont susceptibles d'augmenter puisque les différents regroupements qu'elle a créés se rassemblent pour façonner une nouvelle architecture financière mondiale. Ceci est encore dans l'avenir, mais la tendance est indéniable.
IPS/allafrica.com
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