UNIVERSITES PUBLIQUES : Vers une rentrée académique impossible

Lundi 22 Septembre 2014

Malgré le trop plein d’étudiants qui plombe la qualité des enseignements, les universités publiques sénégalaises vont devoir encore faire de la place. En effet, 31 399 nouveaux bacheliers viennent d’être orientés dans celles-ci.


L’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad), qui compte déjà plus de 80 mille 500 étudiants, va en recevoir 22 mille 400  dont 77 % de littéraires.
Les services du  ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ont annoncé, mercredi dernier, à travers un communiqué, avoir procédé à l’orientation des nouveaux bacheliers pour l’année académique 2014-2015.  Ainsi, indique le ministère, sur les 37 381 candidats ayant décroché le bac en 2014, 31 399 ont été ventilés dans les universités de Dakar, Thiès, Saint-Louis, Ziguinchor et Bambey. «Il reste 5 982 étudiants que le ministère de l’Enseignement supérieur va encore essayer de répartir entre ces cinq universités», ajoute le communiqué.
Vers une rentrée impossibleEn clair, il s’agira de faire passer un éléphant dans le trou d’une aiguille.  L’Ucad qui compte près de 90 mille étudiants, compte non tenu des départements privés qui y pullulent, en a reçu, virtuellement, 22 mille 400. Des chiffres qui font froid dans le dos. Mais qui laissent de marbre le professeur Idrissa Ba, enseignant au Département d’histoire de la Faculté des lettres et sciences humaines (Flsh) et chargé de l’information et de la communication de la coordination du Syndicat automne de l’enseignement du supérieur (Saes) de l’Ucad. Pour le syndicaliste, qui indique ne guère être surpris par ces chiffres, aussi alarmants soient-ils, «cela fait des années que l’Ucad ne fonctionne pas à cause du surpeuplement». Plus que pessimiste, le Pr Ba  prédit une «rentrée académique impossible». «Où est-ce qu’on va les mettre ?», s’interroge-t-il.
Des conditions incompatibles avec l’excellenceSi, au mois d’octobre dernier, les étudiants de l’université Gaston Berger dénonçaient la pléthore d’étudiants que le ministère avait orientés à l’Ugb, l’Université de Dakar reste la principale victime du surpeuplement des universités publiques. Et, ce trop plein d’étudiants n’est pas sans conséquences. Non seulement le quantum horaire n’est pas honoré mais, dans certaines facultés, appliquer le système LMD est juste impossible. Des bacheliers, qui avaient postulé depuis le 1er juillet 2013, à travers la plateforme mise en place par les services du ministère de l’Enseignement supérieur pour l’année académique 2013-2014, ont été orientés au mois d’août dernier après que les résultats du Bac 2014 sont publiés. Un extraordinaire retard dont l’Ucad s’accommode depuis des années.
En attendant que ces nouveaux bacheliers débarquent, les «anciens» ne savent plus à quel saint se vouer. Au-delà du calendrier chinois auquel se réfère l’université de Dakar, le nombre d’enseignants, très insuffisants par rapport aux étudiants, est un autre mal qui la gangrène.  De nombreux étudiants sont privés d’inscription faute de  professeur encadreur. Les membres du Collectif Master pour tous, créé à la Flsh, sont à rechercher dans ce lot.
Toujours dans cette faculté qui compte plus du tiers de l’effectif de l’Ucad, les étudiants dénoncent régulièrement les œuvres au programme introuvables, leur insertion professionnelle quasi impossible et le taux d’abandon au second et troisième cycle très élevé. A la Faculté des sciences et techniques (Fst), depuis le début de l’année, aucune séance de Travaux dirigés ou pratiques (Td et Tp) n’est effectuée.
Du côté du campus social, le tableau n’est guère plus reluisant. Malgré que plus de la moitié du budget du Coud est consacrée à la restauration, la bouffe reste toujours à désirer, la qualité et l’hygiène des repas étant reléguées au second plan malgré leur valeur. Les problèmes de logement, d’un autre acabit, demeurent sans solution. Moins de 4 000 lits  pour près de 90 mille étudiants. Ce qui représente une moyenne de 22 étudiants par lit.
Des étudiants désespérés  Ces problèmes, en plus de décourager les étudiants qui se retrouvent sans perspectives, les maintiennent dans un cycle de violence non sans retombées. L’année dernière déjà, après 10 jours de grève de la faim qui n’avaient mené à rien, trois étudiants en année de licence au Département de géographie avaient failli s’immoler.  Evacués d’urgence à l’hôpital Principal de Dakar, ces étudiants traînent toujours les stigmates de leur «folie». L’année 2014 va être plus funeste pour avoir vu deux étudiants se faire tuer. D’abord Saër Boye, un étudiant en 4ème année à l’Inseps qui partait manger au restaurant Central et qui y laissera la vie après une rixe avec un camarade. Ensuite, Bassirou Faye dont l’assassinat, le 14 août dernier, allait précipiter la fermeture du campus de Dakar.
Des «réformettes» impopulaires   L’Etat, principal responsable de cette politique, qui consiste à construire dans chaque département du Sénégal un lycée sans que des universités ne suivent, se borne dans des «réformettes» sans impact sur le quotidien des facultés. Cherchant, vaille que vaille, à faire des économies, l’Etat cherche à orienter l’enseignement supérieur vers un 50/50 entre public et privé. Ce qui fait dire au professeur Ba que «l’Etat a tourné le dos aux universités». Le budget 2014, voté le mardi 26 novembre, avait déjà vu l’Etat grignoter les subventions accordées aux universités. D’ailleurs, révèle Ba, «jusqu’au moment où on se parle, le budget de l’Ucad n’est pas disponible». Prenant pour preuve les enseignants vacataires qui sont restés plus de dix mois sans être payés, il s’interroge sur les véritables motivations académiques de nos gouvernants. Pour compenser, le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche avait trié au volet les 78 recommandations issues des conclusions de la Concertation nationale sur l’enseignement supérieur (Cnaes) pour n’en appliquer que certaines dont la plus impopulaire reste la hausse des frais d’inscription des étudiants. Et alors que les étudiants demandent en retour le paiement à temps de leur bourse, le président de la République met en branle un projet de loi relatif aux universités publiques. Un projet loin de faire l’unanimité et attaqué de toutes parts par des enseignants qui y voient «une atteinte aux libertés académiques».
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