Mamadou Bocar Sy, Directeur général de la Bhs : « Nous finançons tout client justifiant d’une activité générant un revenu régulier et compatible avec le crédit sollicité »

Mercredi 5 Juillet 2023

La Banque de l’habitat du Sénégal (Bhs) comptabilise 43 ans d’expertise dans le financement du logement au Sénégal. L’institution bancaire a financé plus de 270.000 ménages durant cette période, selon son directeur général. Mamadou Bocar Sy. Dans cette interview exclusive au Journal de l’économie sénégalaise (Lejecos), M. Sy revient sur les innovations introduites par la banque pour faciliter l’accès au logement. Il confirme de ce point de vue que toutes les couches socio-professionnelles sont prises en charge par la Bhs y compris les émigrés.


Quelles sont les innovations de la BHS pour faciliter l’accès au logement en dehors des schémas classiques ?

La BHS est dans une démarche continue d’adaptation de ses règles d’intervention en faveur de ses clients, chaque client est un « profil à part » en termes de revenus, d’activités, d’âge, etc. Qui plus est, l’accès au logement doit être planifié et préparé.
Notre rôle est de nous adapter entre le demandeur de logement, notre client et le promoteur-vendeur du logement sur lequel nous n’avons aucune prise, nous devons financer le premier pour acheter le produit de l’autre.
Nos innovations sont permanentes et sont fonctions du client ou des clients selon que leur accès au logement est planifié ou non, que cet accès soit individuel ou collectif, etc.

Ainsi nous offrons aux plus prévenants, le Plan d’Epargne logement qui consiste à épargner sur 2 à 5 ans afin d’emprunter à faible taux sur une durée pouvant aller jusqu’à 20-25 ans ;
Nous accompagnons aussi les démarches collectives pour un accès au logement dans la solidarité des membres, via les coopératives d’Habitat parrainées souvent par les employeurs. . Et là nous avons de belles réussites avec les militaires, gendarmes, magistrats, enseignants, agents des télécoms, etc.
Nous finançons aussi bien les salariés et que les auto-entrepreneurs appelés communément les informels, nous nous adaptons juste à la nature et à la qualité des revenus. Il s’agit en fait d’affecter un « loyer payé mensuellement à un tiers et indéfiniment jusqu’ au remboursement d’une échéance d’un crédit sur un bien qui vous appartient ». Donc si vous pouvez payer un loyer, vous pouvez payer un crédit immobilier, si les prix des logements sont raisonnables ou fixés en fonction des clients-acquéreurs et non d’une manière spéculative.
Nous pouvons aussi dans certaines conditions financer les logements sociaux sans apport personnel, c’est-à-dire à 100%.
Mais l’accès au logement est à préparer dès qu’on a la chance de trouver un travail, donc un revenu et avant l’âge de 40 ans pour s’endetter sur des durées longues et avoir des échéances compatibles avec votre quotité, car le logement est un poste parmi d’autres de nos charges mensuelles.
A chacun de nos clients, nous coconstruisons ensemble une solution de crédit compatible avec le profil de ses revenus personnels.
  
Souvent les personnes âgées sont exclues des financements bancaires alors que les mécanismes ne manquent pas. Que fait la BHS pour cette frange des travailleurs ?
 
Je vous renvoie aux réponses à la première, l’investissement immobilier au titre de la résidence principale est un investissement majeur, qui se passe pour la majorité des populations, une fois dans la vie et dans la vie active. Il convient donc de le faire dès que nous avons la chance d’avoir des revenus, car il remplace une charge locative permanente.
Deuxièmement, plus on le fait tard, plus on rembourse sur une courte période sans compter que l’assurance décès invalidité est plafonnée à 65/70 ans.
Cela dit, nous accompagnons les clients qui veulent « refinancer » leurs logements pour les adapter à la taille de leur famille, à l’évolution de leurs revenus et charges, etc.
 
Je précise que nous accompagnons les personnes jeunes comme âgées dans différents produits et investissements immobiliers ; résidences secondaires, locatifs, etc.
 
Les personnes âgées ne sont censées être concernées par la résidence principale, mais peut-être pour préparer leur retraite et leur succession. Sur ces chapitres, il existe une panoplie de produits immobiliers que nous avons conçus en liaison avec les compagnies d’assurances.
  
Les acteurs du secteur informel sont souvent laissés en rade dans le financement pour l’accès au logement. Que fait la BHS pour ces travailleurs du secteur informel ?
 
C’est une vue de l’esprit, car la BHS finance tout client justifiant d’une activité générant un revenu régulier et compatible avec le crédit sollicité.
C’est vrai que nous sommes plus confortables avec les salariés, mais la faiblesse de l’emploi salarié dans nos pays et l’importance croissante de l’auto-entreprenariat et du caractère informel de notre économie ne nous permettent d’ignorer cette frange de notre population.
Elle est pourvoyeuse de ressources et capable d’autofinancer une bonne partie de leur crédit. 
Nous avons développé pour cette catégorie de clients un plan d’épargne qui permet de tester leur capacité d’épargne sur la durée afin de leur prêter un montant compatible à leurs revenus.
C’est vrai que c’est une population pour laquelle nous devons avoir des mécanismes d’assurance et de garantie capables de rendre plus sécurisées les crédits que nous leur accordons.
C’est à nous de nous intéresser à eux, de connaitre leurs activités et leurs besoins immobiliers pour les y aider. Elle mérite notre intérêt et notre attention.
 
Pionnière dans le financement de l’accès au logement, quelle serait selon vous les axes d’intervention pour améliorer ce mécanisme ?

Nous sommes des bailleurs de fonds aussi bien de l’offre ; promoteurs immobiliers et Coopératives que de la demande ; les acquéreurs.
Pour les clients qui ont des projets individuels d’auto-construction, c’est plus simple car ce sont des projets sur mesure. En revanche, pour les clients acquéreurs de logements à réaliser par des promoteurs c’est plus compliqué.
Car les clients ne maitrisent ni les coûts ni les délais de livraison des logements, encore moins la qualité. Le secteur de l’offre de logements, comme beaucoup de secteurs a donc besoin d’être mieux régulé, organisé bref d’être professionnalisé.
Heureusement que nous notons l’arrivée de nouveaux acteurs qui tirent le marché vers le haut.
Il reste à l’Etat de mieux organiser les choses et aux promoteurs de construire dans les délais indiqués, des logements et accessibles aux clients
Pour notre part, nous allongeons les durées de plus en plus et baissons les taux lorsque le coût de la ressource le permet.
 
La BHS a développé des mécanismes innovant pour la Diaspora, pouvez-vous y revenir ?
 
Pour la Diaspora, il s’agit tout d’abord de mettre à leur disposition un réseau de proximité pour les aider à transférer leur épargne plus facilement.
C’est ainsi que nous sommes aux États-Unis depuis près de 3 décennies et que nous sommes à nouveau à Paris depuis plus de 10 ans.
Ensuite on a offert à nos compatriotes de la diaspora des produits d’épargne et d’assurance, qui leur permet d’épargner et de préparer leur retraite.

Enfin, pour organiser la disponibilité de l’information sur les promoteurs que nous accompagnons et une fois leur choix fait, nous les finançons pour l’acquisition du terrain et/ou du logement.

C’est un accompagnement dans leur choix et un suivi de leur projet.
Comme je le dis souvent, nous sommes le lien et le liant entre nos compatriotes de l’Extérieur et leurs familles et parents au Sénégal. Et ils nous le rendent bien.
 
Quelle est la différence entre promoteur privé et coopératives d’habitat ? Quel devrait être le rôle des coopératives d’habitat et de la BHS dans le programme 100 000 logements ?
 
Elle est fondamentale !
Le promoteur privé est un investisseur qui construit des logements pour les vendre avec une marge bénéficiaire
La Coopérative d’habitat est un regroupement de membres ayant souvent la même profession ou secteur d’activités qui réunissent leurs moyens, s’endettent ensuite pour acheter un terrain et construisent leurs logements qui paient au prix coutant sans marge, avec des économies d’échelle.

Dans le premier cas, les destinataires ne sont pas connus au départ, dans le deuxième cas ils sont connus et les logements sont conçus et réalisés en fonction de leurs revenus et capacité d’endettement. Ils sont aussi souvent accompagnés par leurs employeurs et par la puissance publique avec une fiscalité allégée.

Notre rôle avec les Coopératives est capital dans le programme des 100 mille logements, car nous apportons 43 ans d’expertise dans le métier avec plus de 270.000 ménages financés, une capacité de mobilisation de ressources uniques et un accompagnement professionnel.
Lejecos Magazine
 
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